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Les rôles et les pouvoirs du syndic et vos obligations en tant que membre d’un ordre professionnel

Andy Noroozi, trad. a., int. a., avocat, LL.M. fisc.
Syndic en chef, OTTIAQ

Les tribunaux judiciaires et les conseils de discipline des ordres professionnels du Québec l’ont souvent rappelé : l’exercice d’une profession est un privilège et non un droit1. De ce fait, le membre d’un ordre professionnel est tenu de respecter les obligations et les responsabilités qui lui incombent. 

Pour surveiller et assurer l’intégrité de ses membres, le Conseil d’administration de l’Ordre des traducteurs, terminologues et interprètes agréés du Québec (ci-après « l’ordre » ou « l’OTTIAQ ») nomme un ou plusieurs syndics2.  Un syndic doit être membre de l’ordre3. Le mandat d’un syndic est hybride et s’inscrit dans le cadre du principal rôle de chaque ordre professionnel qu’est la protection du public4. D’une part, le syndic réalise des enquêtes sur les manquements déontologiques commis par des membres et s’il y a lieu porte plainte contre ceux-ci devant le conseil de discipline. D’autre part, il exerce une fonction de conciliation des comptes lorsqu’un client qui a un différend avec un membre en fait la demande5

D’emblée, il faut préciser que le syndic n’enquête pas sur la compétence des membres. Encore que le syndic puisse demander au comité d’inspection professionnelle (ci-après le « CIP ») de soumettre un membre visé par une demande d’enquête à une inspection professionnelle, c’est le CIP qui veille au contrôle de la compétence des membres et à la surveillance de l’exercice de la profession par les membres. Bien entendu, dans certains cas, la compétence d’un membre et son intégrité peuvent se chevaucher, par exemple si un membre a commis une erreur linguistique si grossière que cela constitue une faute déontologique. 

Les articles 122, al. 1 CP et 34 du Code de déontologie de l’Ordre des traducteurs, terminologues et interprètes agréés du Québec (C-26, r. 270) (ci-après le « Code de déontologie ») qui consacrent les rôles et les pouvoirs du syndic sont rédigés en ces termes :

« Code des professions
122. Un syndic peut, à la suite d’une information à l’effet qu’un professionnel a commis une infraction visée à l’article 116, faire une enquête à ce sujet et exiger qu’on lui fournisse tout renseignement et tout document relatif à cette enquête. […] 

Code de déontologie 
34. Le membre doit répondre à toute demande provenant du syndic, du syndic adjoint, des membres du comité d’inspection professionnelle, du secrétaire ou du secrétaire adjoint de l’Ordre, dans l’exercice des fonctions qui leur sont dévolues par la loi; il doit de plus répondre dans le délai et selon le mode de communication que ceux-ci déterminent. » [Nos soulignements]

Les infractions visées à l’article 122 CP sont notamment :

  1. les infractions aux dispositions du Code des professions;
  2. les infractions aux dispositions de la loi constituant l’ordre dont une personne est membre ou des règlements adoptés conformément au CP ou à ladite loi ainsi que de toute requête faite en vertu de l’article 122.0.1 CP.

Une enquête réalisée par le syndic peut débuter à la suite d’une demande d’enquête, soit au moment où une personne transmet une information au syndic selon laquelle un professionnel a commis une infraction. Le déroulement de l’enquête est confidentiel et le syndic souscrit un serment de discrétion stipulant qu’il ne peut révéler ou faire connaitre, sans y être autorisé par la loi, quoi que ce soit dont il aura eu connaissance dans l’exercice de sa charge6. L’enquête doit par ailleurs être distinguée de la plainte, cette dernière désignant l’étape postérieure à l’enquête lors de laquelle le syndic porte une plainte officielle contre le professionnel devant le conseil de discipline7. Contrairement à l’enquête, la plainte et son instruction sont publiques8.

Lorsqu’un membre est visé par une enquête, celui-ci a des devoirs à respecter. Il doit notamment répondre au syndic dans les délais que celui-ci détermine et lui fournir tout renseignement demandé. L’obligation de collaborer avec le syndic constitue une obligation de résultat, c’est-à-dire que le membre doit obligatoirement atteindre le résultat établi par le syndic (par exemple, communiquer un document précis dans la forme prescrite par le syndic). Le défaut de collaborer avec le syndic constitue une infraction disciplinaire grave. Ainsi, le non-respect d’un délai, le refus de fournir un document ou un renseignement ou le fait de faire une fausse déclaration constituent des formes d’entrave au travail du syndic et exposent le membre au dépôt d’une plainte devant le conseil de discipline. Les conséquences d’un tel manquement sont sérieuses et demeurent au dossier du membre.

En outre, il est important de souligner que le syndic ne joue pas le rôle d’un tribunal, si bien qu’il n’est pas tenu d’être impartial dans le cadre de son enquête9. En fait, le rôle du syndic s’apparente davantage à celui d’un enquêteur que celui d’un juge qui préside un procès. Qui plus est, l’indépendance du bureau du syndic doit être préservée en tout temps10. De ce fait, le conseil d’administration et les employés et représentants de la permanence de l’ordre ne peuvent intervenir ou s’ingérer dans les enquêtes réalisées par le syndic.

Si aux termes d’une enquête qu’il a réalisée, le syndic décide de ne pas porter plainte contre un membre, il en informe le demandeur d’enquête qui disposera alors d’un délai de 30 jours pour demander l’avis du comité de révision. En revanche, s’il est d’avis qu’une infraction ou une faute déontologique a été commise par un membre, il peut porter plainte devant le conseil de discipline. Précisons finalement qu’un syndic qui estime que les faits allégués au soutien de la demande d’enquête peuvent faire l’objet d’un règlement peut proposer au demandeur d’enquête et au membre la conciliation, et ce, en tout temps avant le dépôt d’une plainte contre ce professionnel au conseil de discipline11.

Puisque les pouvoirs du syndic s’inscrivent dans le cadre du mécanisme de protection du public, le syndic reçoit des demandes d’enquêtes visant un membre, et non l’inverse. Ainsi, le syndic ne pourra procéder à une conciliation de compte à la demande d’un membre. Seul un client peut formuler une telle demande12. Dans la même optique, une demande d’enquête déposée par un membre relativement à un geste commis par son client serait irrecevable. Or, une demande d’enquête peut valablement être déposée par un membre contre un autre membre. Il arrive également que la nature de la demande d’enquête ne vise que la compétence du membre, auquel cas le syndic peut en informer le comité d’inspection professionnelle13

En assumant son rôle de protection du public le syndic de l’OTTIAQ veille donc à l’intégrité des membres. Lorsqu’un membre est visé par une demande d’enquête, celui-ci est tenu répondre aux demandes provenant du syndic afin de permettre à ce dernier de réaliser son enquête. 

Enfin, dans le but de minimiser les risques de commission d’une faute déontologique, il est conseillé au membre de tenir ses connaissances à jour et de réviser régulièrement les lois, règlements et règles de pratique professionnelle auxquels il est assujetti


Bureau du syndic

Actuellement, le bureau du syndic est composé des membres suivants :

Andy Noroozi, trad. a., int. a., avocat, LL.M. fisc.
Syndic en chef

Sébastien St-François, trad. a.
Syndic adjoint

1Voir notamment : Belhumeur c. C.S. Montréal, 500-05-002939-831, le 13 mai 1983 (Appel rejeté, 1988 CanLII 719 (QC CA), [1988] R.J.Q. 1526 (C.A.)). Dentistes c. Dupont, 2003 QCTP 77 (CanLII), 2003, QCTP 077, page 15.
2Dans les faits, il y a un syndic et il peut y avoir un ou plusieurs syndics adjoints.
3Art. 121 CP du Code des professions (ci-après « CP »).
4Art. 23 CP.
5Règlement sur la procédure de conciliation et d’arbitrage des comptes des membres de l’Ordre des traducteurs, terminologues et interprètes agréés du Québec (C-26, r. 278) (ci-après « RCC »).
6Art. 124 et Annexe II CP.
7Articles 127 et 128 CP.
8Art. 142, al. 1 CP (sauf exception, les audiences sont publiques).
9Parizeau ès qualités « Avocate » c. Barreau du Québec, REJB 1997099258 (C.S.), para. 63 et 64.
10Art. 121.1 CP.
11Article 123.6 CP.
12Articles 1 et 2 RCC.
13Article 122.1 CP.


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