Parmi les métiers de la langue, la traduction est celui qui est en prise directe sur les téraoctets d'information transitant quotidiennement de l'anglais vers le français et vice-versa. Ses praticiens doivent être au diapason des organismes d'État et entreprises pour lesquels ils œuvrent en poste ou à la pige. Ils sont tenus de maîtriser les langues de spécialité qui expriment l'essence même de ces organisations productrices de biens ou de services dans une myriade de secteurs d'activité.
Fournisseurs en amont et clients en aval, un traducteur, une traductrice surfe le marché et épouse au plus près ses flux et ses reflux, au point d'équilibre mouvant, dynamique, toujours redéfini, de l'offre et de la demande.
Au cours de ses trente années d'existence, Circuit a été témoin de ces flux et reflux. Périodiquement, le comité de rédaction a tâté le pouls du marché et a rendu compte de son évolution, de sa transformation. Les divers extraits que nous proposons à nos lecteurs aujourd'hui en témoignent.
L'offre – En décembre 1983, Josée Ouellet Simard dégage les lignes de force sous le titre « Profession : Traductrice ».
Décembre 1983, n°3
Profession : Traductrice
Par Josée Ouellet Simard
Jamais le marché québécois de la traduction n'aura connu d'effervescence pareille à celle des dernières années, phénomène auquel a largement contribué, bien sûr, l'entrée en vigueur de la Charte de la langue française au Québec en 1977. Statistique Canada, en 1981, dénombrait en effet 3 175 traducteurs et interprètes, soit presque quatre fois plus qu'en 1971. Un an plus tard, les résultats d'un sondage effectué par la Société des traducteurs du Québec (STQ) expliquaient dans une certaine mesure cette multiplication spectaculaire de l'effectif : 58 % de l'ensemble des services de traduction existant en 1982 ont été créés après 1970 et 27 %, après 1976. Fait plus significatif encore, la création des services de traduction d'entreprises privées remonte à moins de 12 ans dans 71 % des cas et à moins de 7 ans dans 38 % des cas. Enfin, 61 % des traducteurs ayant participé à ce sondage comptent moins de 5 ans d'expérience.
Phénomène marquant de cette évolution : la présence croissante des femmes.
Entre 1971 et 1981, leur nombre a plus que quadruplé, tandis que celui des hommes triplait à peine, de sorte qu'en 1981, elles constituaient 56 % de l'effectif de la profession. Un an plus tôt, en 1980, on comptait à la STQ 65 % de femmes chez les membres agréés et 70 % chez les membres adhérents (d'arrivée plus récente) ce qui laissait entrevoir l'accentuation de cette tendance à la féminisation. En 1982, de fait, 78 % des répondants au sondage de la STQ étaient de sexe féminin.
Entre temps, la profession s'autonomise. C'est le constat que fait Paul Horguelin dans une conférence au congrès de la Société des traducteurs du Québec, sous le thème Nouvelles pratiques, nouvelles compétences : aménager le présent pour prévoir l'avenir.
Septembre 1986, n° 14 – Sur le vif
La part grandissante prise par la sous-traitance sur le marché de la traduction constitue un fait marquant de la décennie. Ainsi, précise Paul Horguelin, au début des années 1980, le nombre de mots traduits en sous-traitance pour le Bureau des traductions a plus que doublé pour atteindre le quart de la production globale. De son côté, le secteur privé fait de plus en plus appel aux services de cabinets, d'agences ou de traducteurs indépendants, multipliant les emplois à temps partiel et les contrats à durée déterminée. Peu à peu, un glissement s'opère des salariés vers les indépendants.
Mais quand on est à son compte, il faut être au service de son client. C'est un nouvel apprentissage que les traducteurs doivent faire, eux qui jusqu'ici se contentaient d'être les gardiens de la langue. C'est donc à une révolution des esprits et des cœurs qu'invite le dossier du numéro 20, mettant en lumière la complémentarité du traducteur et de son client.
Mars 1988, n° 20
Langagiers, pensez client
Il faut troquer son lorgnon d'archiviste contre un kaléidoscope. Car le client n'a que faire d'un conservateur de la langue, pas plus que d'un policier ni d'un mécanicien. Il a besoin d'un communicateur.
Nada Kerpan livre l'essentiel des propos de Jacques Houpert, des services de communications marketing de Systèmes d'informatique de Bell Canada.
Circuit : Spécialiste du marketing et de la communication, vous êtes aussi fort demandeur de traduction, d'adaptation et de rédaction. Trouvez-vous étrange que les langagiers parlent de marketing linguistique ?
Jacques Houpert : Nullement ! Le produit linguistique existe; il peut être développé en fonction des besoins du marché; on peut en faire la promotion et le mettre en circulation dans un marché donné. De plus, il vaut son pesant d'or.
Mais il ne s'agit pas seulement d'en avoir l'audace; il faut être conséquent avec le concept même. Cela suppose, chez le langagier, une attitude différente de celle qu'il a tendance à avoir et qui est l'opposé de la démarche marketing. Faire du marketing, c'est savoir répondre aux attentes de sa clientèle.
Circuit : Qu'est ce qui vous déplaît chez le langagier ?
J. H. : Il charrie l'image d'un policier, d'un censeur. Il est celui qui connaît la langue et qui est en mesure de dire comment on doit dire les choses – ce qui n'est pas totalement faux. J'insiste sur cette image de policier qu'il transmet, car elle est tout à fait à son désavantage.
La personne qui fait du marketing cherche avant tout à répondre aux besoins d'un marché donné. Elle en analyse les besoins, développe un produit qui répond aux attentes, concentre tous ses efforts sur les attentes de ce marché.
Quand on se prend pour un censeur ou un policier, on est moins à l'écoute de la clientèle ; on détient plus une autorité sur la langue et on répond moins à un besoin. Le besoin ne se situe pas au niveau du langage : c'est de communication que la clientèle du langage a besoin.
Circuit : La langue n'est-elle pas le moyen même ?
J. H. : Ce qu'on demande à un plombier, ce n'est pas de vendre des tuyaux, c'est de faire circuler l'eau. Autrement dit, le langagier doit promouvoir son produit linguistique en prouvant au client que ce produit lui rapportera. Il doit faire la preuve que la qualité de la langue est essentielle à la qualité de la communication et que la qualité de la communication est liée au succès de l'entreprise. Pour moi, c'est une évidence. C'est ça positionner le produit linguistique.
Jacques Houpert reconnaît cependant que certains clients ne perçoivent pas le lien entre qualité de la langue et efficacité de la communication à l'avantage de l'entreprise, ce qu'il explique principalement par la condition québécoise, « minorité noyée dans un grand tout anglophone ». Bref, le positionnement et le style d'intervention du traducteur dans l'entreprise sont liés au fait qu'il met de l'avant une langue minoritaire s'inscrivant dans un rapport de forces économique et politique. Il est, par définition, au point de contact, donc de friction, éventuellement de rupture de deux mondes que sa fonction l'appelle à conjuguer.
Poursuivant la réflexion marketing, Pierre Marchand débusque les idées reçues, posant la question :
Faux. Les clients du langagier ne sont jamais des collectivités, mais toujours des individus. Quand vous négociez un travail, c'est avec un être humain que vous traitez.
Notion à revoir. Le marché a beaucoup évolué depuis une vingtaine d'années. Les donneurs d'ouvrage sont plus conscients des règles de la communication. Ils s'attardent moins sur des questions de grammaire ou de terminologie et focalisent sur la valeur communicationnelle du texte.
Soit, mais la compétence technique ne suffit pas. La qualité de la relation entretenue avec le donneur d'ouvrage est la clé de la réussite. Au-delà de la rationalité technique et commerciale, de la stricte compétence professionnelle, savez-vous créer avec votre client une relation de confiance, le sentiment de votre engagement personnel envers lui ? C'est à cette certitude que tient la valeur perçue de vos services. Voilà tout l'art du marketing.
Sous le titre Comment être un bon placement, Betty Cohen confirme que dans les valeurs mobilières, le marketing du traducteur tient à un engagement sans faille et de tous les instants.
Le marketing du traducteur en valeurs mobilières tourne donc autour d'un seul et même axe : la rentabilité par la rapidité. Et cette rapidité suppose trois atouts : la connaissance du domaine, la disponibilité et, essentiellement, le dynamisme. La finance est, par définition, un domaine mouvant et ouvert aux nouveautés et à la modernité. Mais elle est également sensible et, si elle fonde ses décisions sur des données très rationnelles, elle se laisse aussi guider par son intuition et ses impressions. Il faut donc présenter une image qui correspond à ses exigences : une image dynamique, moderne et ouverte, l'image d'un professionnel tourné vers l'avenir et prêt à s'y consacrer.
Savoir se vendre est d'autant plus important que la crise économique frappe de plein fouet. La saga Multiscript/La Langagerie marque la crise de croissance de l'industrie de la traduction. Maintenant de propriété américaine, l'entreprise est née de la fusion des deux cabinets constituant sa raison sociale. Circuit estime que le nouveau supercabinet est le plus important au Canada : plus de 80 employés et un chiffre d'affaires dépassant les 5 millions de dollars. Il fait partie du réseau international d'ALPNET, de Salt Lake City.
Mars 1989, n° 24
La saga Multiscript/La langagerie
Sous la houlette des Américains, le nouveau géant de la traduction aura-t-il plus de veine que ses prédécesseurs ?
Par Paul Morisset
Implantée en Amérique, en Europe et en Asie, ALPNET se présente comme la plus importante entreprise de traduction du monde, avec un effectif global de plus de 400 personnes.
La traduction serait-elle vouée elle aussi à une mondialisation croissante, comme les industries manufacturières, la finance, la publicité ?
Il faut savoir que les cabinets de traduction fusionnés traversaient tous deux une mauvaise passe. Une réduction des frais indirects, une rationalisation éliminant les dédoublements sont donc à l'ordre du jour. Départ du quart du personnel et plus depuis la fusion. Contrôle des dépenses. Augmentation des tarifs. Rentabilité en vue. Le marché visé ? Les multinationales, la mondialisation entraînant un besoin accru de services de traduction uniformisés.
En attendant, Pierre Marchand pose la question : Y a-t-il trop de traducteurs sur le marché du travail ou pas assez ?
Idée reçue : au début des années 1970, les nouveaux arrivants peinaient à satisfaire à la demande... tandis qu'au début des années 1980, le rapport s'est inversé, les nouveaux diplômés étant en surnombre.
Pourtant, dans une étude menée pour le Secrétariat d'État, Jean Charpentier, du Conseil du trésor, affirme l'inverse. Et de souligner : pénurie de candidats dans les cursus universitaires, manque de formation en exercice dans les cabinets, pénurie d'interprètes, appui technologique insuffisant du Secrétariat d'État (Termium), traitement de la facturation trop lent au Secrétariat (90 jours), tarif plancher, nombre insuffisant de réviseurs dans certains domaines spécialisés, etc.
Près de 3 500 traducteurs à trouver d'ici cinq ans ?
Deux sociétés de conseils en gestion (Coopers & Lybrand et Coquos Corporation) établissaient la demande totale en traduction au Canada, pour 1987-1988, à 750 millions de mots (secteurs public et privé confondus). L'une et l'autre société s'accordaient, d'autre part, à fixer le taux de croissance annuel à 10 %, ce qui paraît exagéré pour le Canada [...]. Il [...] a donc semblé plus réaliste d'envisager un taux de croissance annuel de 5 %, ce qui porterait la demande globale dans cinq ans à 950 millions. La demande actuelle occupant 5 000 traducteurs, il en faudrait donc, dans cinq ans, 1 700 de plus, [...]. Mais il faut également tenir compte de l'usure chez un effectif notoirement âgé. Si on applique un taux d'attrition annuel de 6 %, ce ne sont plus 1 700, mais bien 3 470 traducteurs qu'il nous faudra trouver d'ici 5 ans.
Bien plus, même, en supposant une croissance zéro, poursuit le rapport, l'attrition seule suffira à créer une pénurie de 1 020 traducteurs en 1993.
Demande de traduction en nombre de mots (secteurs public et privé)
1988 | 750 millions |
1994 | 950 millions (5 % par année) |
Effectif nécessaire
1988 | 5 000 |
1994 | 6 700 |
Effectif fourni par les écoles
150 par année de 1988 à 1994 | 750 |
Effectif à recruter
Demande : 6 700 – 5 000 | - 1 700 |
Attrition (6 % x 5 ans) | - 1 700 |
Total | - 3 470 |
Déjà, donc, le Bureau de la traduction jouait les Cassandre et annonçait une pénurie de traducteurs. Vrai ou faux ? Après avoir présenté le Rapport Charpentier, Pierre Marchand revient, deux numéros plus loin, sur les statistiques :
Si l'on en croit le Financial Post du 13 février 1989, le marché de la traduction au Canada s'établirait à 50 millions de dollars par année. Or, d'après le rapport Charpentier (Voir Circuit de mars 1989), les effectifs traduisants seraient actuellement de 5 000 personnes. Faisons le calcul : 50 000 000 /5 000 = 10 000 $ par année. Chacun des traducteurs rémunérés au Canada ne gagnerait en moyenne que 10 000 $. De quatre choses l'une : le FP sous-évalue le marché, le rapport Charpentier surévalue les effectifs traduisants, les traducteurs canadiens sont très mal rémunérés. Ou l'auteur de ces lignes ne sait pas calculer. Y a-t-il un économiste dans la salle ?
Cassandre avait raison de lancer un avertissement, mais elle n'avait pas lancé le bon. La récession des années 1990 vient frapper impitoyablement la profession. Les services de traduction de grandes entreprises se voient tenus de couper les coûts et doivent se réorganiser pour répondre à des impératifs de plus en plus stricts.
Dans le contexte de remises en question douloureuses où les gestionnaires n'hésitent pas, par nécessité économique, à passer des services entiers à la moulinette, Josée Ouellet Simard résume la situation des services linguistiques pour qui l'art de survivre est celui de rester en prise directe sur les publics qu'ils desservent.
Décembre 1991, n° 35
La gestion des services linguistiques : s'adapter ou disparaître
Par Josée Ouellet Simard
Les services linguistiques d'entreprises n'échappent pas à ce nouvel ordre des choses. Et ces remises en question, ils y sont contraints non seulement par des impératifs financiers, mais par l'évolution accélérée des besoins de la clientèle, qui réclame désormais des textes « clés en main », et par la vigueur de la concurrence que leur livrent les services externes. L'opération débouche souvent sur un repositionnement des services linguistiques, c'est-à-dire sur la modification de l'image qu'ils projettent chez les consommateurs. La qualité continue d'être le fer de lance du marketing de la traduction, mais elle est maintenant investie d'un sens élargi. Elle ne se mesure plus seulement à la fidélité au texte de départ et à la correction linguistique, mais à l'adaptation du message au public auquel il s'adresse et à l'esthétique de la forme, domaine où, bien sûr, la technologie prend la vedette. Le succès des services linguistiques passe plus que jamais par le « clientélisme », par la prise de conscience de l'importance stratégique de leurs relations avec les publics dont ils dépendent et, surtout, par la souplesse des mécanismes qu'ils mettent en œuvre pour répondre aux besoins de ces publics. Ne serait-ce pas téméraire d'ignorer ces nouvelles réalités?
Geneviève Cornibert, alors chef de section au Bureau de la traduction et présidente de l'Association des conseils en gestion linguistique, surenchérit :
Lettre ouverte aux gestionnaires de services linguistiques
Une question de survie
Par Geneviève Cornibert
En ces temps difficiles, bien des entreprises restructurent leurs services, examinent leurs opérations, bref, cherchent où couper. Restreindre les dépenses est devenu un mot d'ordre quasi universel. À titre de gestionnaire de service linguistique, vous en avez l'habitude puisqu'on vous demande depuis plusieurs années de faire plus avec moins. Mais vous voilà aujourd'hui au stade où vous n'avez d'autre choix que de faire différemment avec moins. Votre grand défi, c'est donc de gérer le changement avec succès.
Certes, les services linguistiques ne sont pas les seuls à avoir dû s'adapter au changement, mais on a assisté, au cours des dernières années, à une modification profonde du rôle du gestionnaire de ce genre de services. Tout d'abord, le « super-réviseur » que vous êtes n'a plus le temps de s'assurer que tout ce qui sort de son service est parfait, ou presque ! Comme il faut aller vite – toujours plus vite, car l'information est rapidement périmée –, les traducteurs d'expérience ne sont plus révisés ; tout au plus leurs travaux font-ils l'objet d'un contrôle de qualité.
Il vous faut laisser les questions linguistiques à vos chefs d'équipe et vous préoccuper davantage des questions financières. Vous devez apprendre à utiliser le « bon » vocabulaire avec la haute direction, employer les arguments qui porteront, ne pas faire d'affirmations gratuites, mais citer des exemples que votre directeur pourra comprendre. À quoi bon essayer d'impressionner votre supérieur avec de beaux discours quand tout ce qu'il veut, ce sont des chiffres. Vous n'aimez pas les chiffres ? Il faudra vous y faire et apprendre à les présenter de la « bonne manière ». Vous devrez dire ce que votre service a coûté, mais en profiter bien entendu pour faire valoir votre contribution aux réalisations de l'entreprise qui vous emploie.
Pendant toute la décennie, la profession connaît une série de changements qui la forcent à s'adapter. Adieu les grands services, bonjour le traducteur indépendant. Le constat est dur…
Automne 1997, n° 57
De l'Eldorado à quoi ?
Par Betty Cohen, trad. a.
D'un ensemble structuré composé de nombreux services de traduction et terminologie, notre profession est devenue un réseau fragmenté de mini-cellules qui ont du mal, aujourd'hui, à communiquer entre elles.
Le Canada était effectivement, jusqu'au début des années 1980, un Eldorado pour les traducteurs. Les politiques de bilinguisme, de multiculturalisme et autres avaient créé des besoins tels que la demande surpassait largement l'offre. Le marché était créateur d'emplois, et la profession était structurée de façon à accueillir sa relève à la former et à lui garantir des carrières prometteuses.
La récession de 1982 a marqué le premier coup d'arrêt à cet état de grâce. C'est ainsi qu'un secteur qui n'avait cessé de progresser et de créer des emplois s'est trouvé confronté à l'obligation d'en éliminer.
Malgré tout, Parti québécois et Charte de la langue française aidant, cette récession n'a pas eu un effet si dévastateur car, si les entreprises se trouvaient forcées de mettre à pied pour cause de crise économique elles étaient également obligées de se conformer à la Charte au Québec et au bilinguisme de rigueur au Canada. En définitive ces entreprises avaient sabré dans leurs effectifs, mais sans réduire leurs besoins en traduction. Les traducteurs licenciés se sont donc mis à leur compte, leur principal client étant – ironie du sort – l'entreprise qui venait de les congédier. C'est ainsi que sont apparus les premiers traducteurs indépendants « forcés ». Néanmoins, peu d'entre eux se plaignaient de cet État de fait quelques mois plus tard, et de nombreux autres ont suivi le mouvement, volontairement cette fois. Ainsi s'est amorcée l'une des principales transformations de notre profession : une vague d'« autonomisation » qui n'a cessé de s'accentuer depuis.
Mais les réductions de personnel ont eu une conséquence plus grave : la disparition des structures d'accueil qui assuraient le complément de formation des nouveaux diplômés. En effet, les services de traduction, réduits à leur plus simple expression pour la plupart, non seulement n'embauchaient plus, mais étaient tellement chargés de travail qu'ils n'avaient plus de temps à consacrer aux stagiaires. Cette tendance, amorcée elle aussi avec la récession de 1982, atteint aujourd'hui des proportions considérables
Ont suivi des années de boum économique et financier qui, loin d'inciter les services de traduction à embaucher, ont favorisé au contraire le florissement des entreprises de traduction, allant de la micro-entreprise au grand cabinet employant de 30 à 40 professionnels.
Mais tout ce qui monte doit redescendre, et c'est en 1989 que notre profession a connu son deuxième choc, en même temps que le pays tout entier. Cette crise, plus qu'une simple récession, a été une correction, un rajustement, après des années de bombance injustifiée par les « fondamentaux » de notre économie. Il en est résulté ce que l'on sait : la chasse aux déficits des licenciements massifs, les fameux « dégraissages » et, parallèlement, une religion du dollar, du bénéfice et de l'actionnaire.
Comme toujours, la traduction, perçue comme un mal nécessaire, a été l'un des premiers métiers à écoper – et partout cette fois-ci. Car même le Bureau de la traduction, saint des saints de la profession, plus grand employeur et donneur d'ouvrage, n'a pas échappé à la frénésie des compressions et de la recherche du bénéfice. Et quand on touche au saint des saints, c'est toute la profession qui s'en ressent.
Les compressions ont atteint tout et tout le monde, et à elles se sont ajoutées les progrès informatiques, la mondialisation, l'Internet, autant de facteurs internes et externes qui ont sensiblement changé la physionomie de notre profession.
Mais la résilience est au rendez-vous. Les rationalisations et l'impartition des services de traduction ont donné lieu, dans plusieurs cas, à une mutation, comme en témoigne l'introduction du dossier du n° 62.
Hiver 1998, n° 62
Rationalisation, impartition, mutation
Il est des dossiers qui réservent des surprises. Celui-ci avait démarré sur une question : comment les entreprises qui se sont départies de leur service de traduction font-elles pour assurer la qualité de leurs textes, l'uniformité de la terminologie, etc. En bref, l'impartition ne nuisait-elle pas à la qualité ? Mais au fil du temps et des articles que nous avons reçus, il est vite apparu que notre profession, loin de s'étioler et de battre en retraite devant les impératifs économiques et financiers, a su se réorganiser et maintenir le niveau de qualité auquel elle avait habitué sa clientèle.
Ces changements ne se sont certes pas faits sans heurts, d'un côté de la barrière comme de l'autre. (…) Cependant, nos collègues ont de nouveau fait preuve de détermination, et de dynamisme surtout. C'est ainsi que sont nées des équipes comme Versacom ou Transcript, anciens services transformés en entités juridiques indépendantes dont le premier client est l'ancien employeur, mais qui s'affirment de plus en plus sur le marché comme des cabinets à part entière. D'autres équipes, qui n'ont pas eu à faire face aux rationalisations, ont dû néanmoins s'adapter à une nouvelle réalité et produire plus, plus vite et mieux. C'est le cas notamment des services de traduction de la Compagnie de la Baie d'Hudson et de la Banque Nationale. Le Bureau de la traduction, pour sa part, a dû faire face aux compressions budgétaires et a su, malgré les méandres complexes de l'administration, effectuer les transformations nécessaires et changer ses méthodes.
Ces articles font cependant ressortir une autre tendance, bien plus fondamentale que l'adaptation d'une profession à une récession économique. Car il ne s'agit pas d'une simple récession. Il s'agit d'une transformation profonde de notre société, du rôle de la grande entreprise et même des lois économiques telles que nous les connaissions jusqu'ici. L'entretien que nous avons eu avec M. Alain Forget ne laisse aucun doute à cet égard. La mondialisation et l'informatisation ont engendré une transformation radicale des rapports économiques et donc des méthodes de gestion et de travail. Et cette transformation est abrupte. Dans un tel contexte, il était normal que les services de traduction aient écopé. Leur histoire démontre amplement qu'ils sont toujours sur la ligne de front. C'est peut-être la raison pour laquelle la profession a développé une espèce de résistance et un réflexe qui font qu'elle plie, mais ne rompt pas.
À la fin des années 1990, la récession était passée et l'offre s'était réorganisée, mais la profession n'était pas au bout de ses peines. Internet, la mondialisation, les nouveaux outils de traduction ont posé de nouveaux défis et, en 2000, nous parlions encore de mutation.
Printemps 2000, n° 67
La traduction canadienne en mutation
par Aline Manson, trad. a.
Multilinguisme – C'est le nouveau mot d'ordre de la traduction, mondialisation oblige. Pour offrir des services multilingues indispensables pour l'exportation, le milieu de la traduction devra s'associer à d'autres professionnels dans le monde ou tout perdre (les exportateurs canadiens font déjà traduire leurs documents ou localiser leurs logiciels dans d'autres pays). Les traducteurs seront-ils des chefs de projet ou des sous-traitants de compagnies multinationales de traduction ?
Technologie – Sous la pression des clients, il faut offrir qualité et vitesse ; il faut donc trouver les moyens d'intégrer la technologie à la fonction traduction pour assurer l'uniformité ou la diversité terminologique, localiser les contenus, réutiliser les documents ou systématiser la création de documents, par exemple.
Relève – Les traducteurs ne sont pas assez nombreux. Ont-ils aujourd'hui toutes les qualifications requises ? Une nouvelle définition de la compétence s'impose, qui tiendra compte du nombre nécessaire de combinaisons linguistiques à maîtriser, des connaissances des outils technologiques à détenir et de la capacité de gérer des projets.
Traduction et contenu — La traduction se redéfinit comme partie intégrante de la création des documents et des contenus ; elle s'intégrera dans l'environnement auteur. La traduction et le multimédia ; la traduction et le plurimédia sont de nouvelles réalités.
Avec la mondialisation, la demande ne cesse de croître. Les cabinets de traductions s'organisent pour y répondre, mais ils ne sont pas seuls. Tout à coup, la traduction devient un filon intéressant et le marché canadien, plus rémunérateur que les autres, attire alors des multinationales qui promettent mer et monde à des prix défiant toute concurrence.
Hiver 2010 – n° 106
De l'art à l'industrie
Par Betty Cohen, trad. a.
La traduction au Canada se heurte aujourd'hui à une réalité qu'elle n'a pas vu ou voulu voir venir, celle d'une concurrence mondiale qui ne connaît de règles que celles du commerce.
En quinze petites années, c'est une révolution que la traduction a connue. Il ne s'agit pas seulement d'une évolution des outils, il s'agit d'une transformation radicale et profonde de notre métier. Plus qu'à la technologie, c'est à la mondialisation que nous devons cela. Traduire aujourd'hui n'est plus l'apanage des seuls pays bilingues comme le Canada, ce n'est plus le « mal nécessaire » répondant à des réalités politiques ou sociales. Traduire aujourd'hui est une nécessité dans une économie mondialisée, un passage obligé pour qui veut traverser les frontières, le prix à payer pour accroître ses marchés et ses revenus. Dans prix à payer, il y a coût. Et que font les entreprises avec les coûts ? Elles cherchent à les réduire.
Certains ont vite compris qui ont investi dans les technologies permettant d'optimiser la rentabilité du traducteur. Ainsi sont nées les multinationales de la traduction, issues souvent non de la profession, mais de la recherche en technologies langagières, et mues non par le professionnalisme, mais par les lois du marché. Pour répondre à la demande croissante, ces entreprises ont perfectionné les technologies. Pour répondre aux particularités culturelles, elles ont inventé la localisation, qui consiste à adapter les vocabulaires aux diverses régions destinataires des produits. Pour répondre à la nécessité de réduire les coûts, elles ont eu recours à la délocalisation. C'est-à-dire que, comme toutes les entreprises dans toutes les sphères de l'activité économique, elles sont allées chercher ailleurs une main-d'oeuvre bon marché. Elles ont pu ainsi accroître leur clientèle, engranger des profits et afficher une croissance insolente, à la mesure de toutes les entreprises technologiques qui ont participé à la bulle du début des années 2000. Comme ces entreprises, elles ont pris de l'expansion avec le développement d'Internet pour ensuite se heurter à une pénurie de capitaux et passer par une phase de fusions et d'acquisitions qui ont donné naissance aux géants d'aujourd'hui.
Par la suite, fortes de leur succès, elles ont cherché à conquérir de nouveaux marchés et se sont naturellement tournées vers les marchés plus traditionnels de la traduction pour offrir leurs services à coûts moindres. Et quoi de plus tentant qu'un pays bilingue, Eldorado de la traduction, comme le Canada. Inutile de dire que les grandes entreprises désireuses d'externaliser leurs services de traduction pour réduire leurs coûts fixes ont vite fait de succomber aux chants de ces sirènes qui semblent avoir une solution à tous leurs besoins.
Cette situation ne fait que s'accentuer et Circuit le constate à nouveau en 2013.
Hiver 2013, n° 118
Le marché de la traduction
Par Pierre Cloutier, trad. a.
À l'échelle mondiale, en 2012, les revenus provenant de la prestation de services linguistiques et de la vente de technologies connexes se chiffrent à plus de 33 milliards de dollars US. Selon les données réunies auprès de 26 000 fournisseurs répartis dans plus de 150 pays, la demande de services langagiers connaît une croissance annuelle de 13 % depuis 2005. Voilà le gâteau.
Notre part ? Le Canada représente un peu moins de 0,5 % de la population mondiale et occupe 10 % du marché mondial de la traduction. Environ 90 % de cette traduction se fait dans ou pour le Québec. Un pactole. On déplore pourtant le nombre restreint de grandes entreprises québécoises de traduction. Cette fragmentation d'un marché constitué de praticiens indépendants favorise l'acheteur. Explique-t-elle la stagnation des tarifs constatée depuis vingt ans, de fait une régression de capacité de gain, vu l'inflation, ce qui amène certains à vouloir troquer le compte de mots pour une tarification horaire ? A-t-elle pour conséquence l'incursion d'agences internationales qui n'hésitent pas à casser les prix à Montréal, tout en dégageant une marge bénéficiaire à l'échelle mondiale dans le cadre de contrats multilingues ?
Le marché de la traduction : notes en vue d'un bilan
Par Jack Philizot
Incontestablement bien des choses ont changé dans notre domaine. Peut-on cependant affirmer que le marché de la traduction s'est fondamentalement transformé ?
Les besoins quantitatifs restent les mêmes, la tarification est pratiquement statique depuis une trentaine d'années, les « quatre piliers » de la profession se maintiennent (services internes, agences, cabinets, traducteurs indépendants), la traduction est toujours la dernière étape du processus de communication et s'assortit de délais tout aussi irréalistes qu'autrefois.
L'évolution, quant à elle, se manifeste dans la répartition des ressources de production et des méthodes d'exécution. Comme dans d'autres secteurs, la technologie impose sa loi et, si elle apporte d'incontestables avantages, elle s'accompagne également de contraintes dont l'attrait économique et professionnel n'est pas toujours certain.
Au fil des années, certaines grandes entreprises se sont départies, à tort ou à raison, de leurs services internes au profit de structures externes, faisant miroiter des volumes considérables à des conditions tarifaires souvent contraignantes. Ce mouvement, qui a touché durement bon nombre de mes collègues, a favorisé une redistribution de l'appareil de production et a aussi contribué à plafonner la tarification à des niveaux peu compatibles avec la nature des services offerts.
Curieusement la traduction, qui est une production intellectuelle, est devenue, avec l'apparition des premières machines de traitement de texte, la cible favorite des passionnés de rentabilité qui ont vu dans l'informatique l'outil idéal qui leur permettrait de se passer des gratte-papier que nous étions alors. C'est ainsi qu'au début des années 1980, la traduction automatique promettait de sonner le glas de notre profession. Cette panacée a coûté inutilement des sommes considérables à quelques grandes entreprises friandes de techniques nouvelles.
Aujourd'hui, nous travaillons sur la base de notions plus réalistes avec des technologies de pré-traduction qui offrent des avantages indéniables aux intervenants, notamment sur les plans de la recherche, de la documentation, de l'uniformité et de bien d'autres facteurs. Malgré tout, leur emploi relève aussi de la recherche d'une meilleure rentabilité et les espoirs qu'elles suscitent à cet égard ne se matérialisent pas fatalement.
Et le Canada n'est pas seul, à en juger par les propos de Marion Boers et Jeannette Ørsted, respectivement présidente et directrice générale de la Fédération internationale des traducteurs.
The Translation Market 2012: As Good As It Gets?
By Marion Boers, FIT President, and Jeannette, Executive Director FIT/IFT
Until now, FIT had not undertaken any systematic market surveys of its own and had relied entirely on external sources, such as: analyses undertaken by national associations that are members of FIT analyses published by universities and international bodies, international analyses by commercial consultancies for the translation industry.
Looking back over a 20-year period, the translation market has been characterized by immense movements of resources: increasing demand for translation, increasing use of technology solutions to meet the demand and, as a consequence, huge pressure on prices, also fuelled by increasing translation costs for companies that sell their products globally. Many other factors have influenced the market to varying degrees in different countries and the overall impression is one of a dynamic, changing market in terms of resources and output.
In 2012, the bulk of the global turnover is managed by large companies and to some extent large public buyers such as European institutions and certain international bodies. A large number of mergers and acquisitions have secured the foothold of the large surviving translation companies on several continents, making it possible for them to work around the clock and to benefit from economic growth in different regions as well as the lower costs of labour in some areas. Their size gives them the economic muscle to drive technological change and development in order to increase efficiency and thereby meet the ever-increasing demand for translation. The downside of this development is the downward pressure on prices and the expectation that freelancers can handle larger and larger packages of files and words in one day.
Mais pourquoi le Canada n'aurait-il pas ses multinationales et quelles seraient les conditions à satisfaire ? Serge Bélair, président et fondateur de TRSB et Ann Rutledge, présidente du conseil d'adfministration de l'Association des industries de la langue, proposent des pistes de solutions.
TRSB : Made in Quebec
Par Serge Bélair
Loin d'être un « mal nécessaire » comme certains le pensent, la traduction doit devenir un moteur de croissance économique. Or, pour assumer pleinement son rôle, l'entreprise de traduction doit faire siennes les bases de toute entreprise et se doter de valeurs simples, universelles et testables, notamment l'enrichissement durable. Autrement dit, l'entreprise de traduction et le traducteur individuel (qu'il travaille en entreprise ou qu'il soit pigiste) sont amenés à créer de la valeur économique par leurs activités. En fait, c'est déjà le cas : les services de traduction que nous offrons à nos clients leur profitent grandement ; nous participons directement et indirectement à leurs succès. C'est la conscience de notre plus-value ainsi exprimée qui garantira la reconnaissance de notre professionnalisme.
Par ailleurs, pour durer, l'enrichissement doit s'articuler sur une vision à long terme. L'enrichissement durable suppose entre autres l'investissement dans l'innovation et dans les ressources humaines. Pour être efficace et viable, la pratique de la traduction doit tenir compte des nouvelles réalités, notamment technologiques, devenues incontournables : outils d'aide à la traduction, mémoires et traduction machine. Il n'y a pas si longtemps, nous étions sceptiques à l'idée d'utiliser un ordinateur quotidiennement. Pourtant, nous sommes arrivés aujourd'hui à un point où la simple évocation d'une panne d'Internet, d'un bris d'appareil ou de la perte d'une tablette ou d'un téléphone soi-disant intelligent nous donne des sueurs froides. Les outils technologiques dans le secteur de la traduction sont là pour rester. Et il faut s'en réjouir, car ils améliorent la productivité et favorisent l'uniformité. Nous avons intérêt à les adopter et à en tirer le maximum.
Investir dans les ressources humaines ne signifie pas seulement embaucher davantage de gens. L'âge moyen des traducteurs ne cesse d'augmenter. Nous devons absolument assurer la relève. Chez TRSB, par exemple, nous avons mis sur pied un programme de mentorat auquel participent nos traducteurs les plus chevronnés. Nous contribuons ainsi à former toute une nouvelle génération de spécialistes. Il ne s'agit pas seulement d'assurer la pérennité de l'entreprise, nous voulons fournir un service continu pour les clients. Voilà un service que n'offrent pas les entreprises de traduction internationales, prisonnières de leurs bas tarifs.
La traduction : une profession en évolution
Par Ann Rutledge, trad. a.
L'ouverture des frontières, l'expansion universelle des télécommunications, la montée des nouvelles technologies, l'utilisation accrue d'Internet… voilà autant de facteurs qui ont contribué à faire exploser les besoins mondiaux en traduction. En 2012, les revenus tirés de la prestation de services linguistiques et de la vente de technologies connexes se sont chiffrés à plus de 33 milliards de dollars US. Du jamais vu. Et ce n'est pas fini ! En effet, selon la firme Common Sense Advisory, qui a analysé les données de plus de 26 000 fournisseurs répartis dans plus de 150 pays, la demande de services langagiers continue de croître d'environ 13 % tous les ans depuis 2005.
Pourtant, ces belles données sont loin de représenter la réalité de l'ensemble des cabinets de traduction canadiens. Prenons la marge bénéficiaire. Depuis dix ans, elle diminue au lieu d'augmenter. Malgré la demande accrue en traduction – marché qui génère tout de même un milliard de dollars au pays – la forte concurrence que nous livrent les agences européennes et américaines entraîne une chute des tarifs. Il se trouve même de nombreuses entreprises canadiennes qui n'hésitent pas à faire traduire leurs documents au Maroc ou en Inde pour une fraction du prix moyen exigé au pays.
Pour survivre à cette concurrence qui lui vient de toute part, l'industrie de la traduction canadienne n'a pas le choix : elle doit s'adapter en changeant certains aspects de sa pratique, à commencer par la tarification. Je crois qu'il est temps de remplacer la tarification au mot par la tarification horaire. La tarification au mot actuelle, qui varie en moyenne de 22 à 26 cents, ne tient plus la route. Malgré un taux d'inflation qui a grimpé de 20 % depuis 10 ans, ces tarifs n'ont pas bougé. Le traducteur tire donc moins de gains de son travail. Une tarification horaire serait beaucoup plus adaptée au marché d'aujourd'hui, notamment avec l'avènement des logiciels de traduction automatique qui facilitent le travail.
Évidemment, ces outils technologiques ne sont pas sans redéfinir notre rôle. Aujourd'hui, le traducteur est devenu un rouage, certes essentiel, d'une mécanique langagière plus complexe. Si nous nous affichons – et nous devons le faire – comme des experts et des conseillers, nous devons miser sur nos principaux atouts : la qualité de nos services et notre expertise localisée, élément déterminant qui positionne mieux un produit dans son marché local.
Je ne crois toutefois pas que l'homo translator soit en voie d'extinction. Si les technologies traitent les mots, l'humain demeure encore seul à pouvoir les interpréter.