Politique et traduction
Par Philippe Caignon, terminologue agréé et traducteur agréé
La politique passionne et fascine, enrage et divise ou encore motive et unit. En fait, personne n’est indifférent aux aléas jalonnant la carrière des personnalités publiques élues pour diriger la nation, qu’elle soit provinciale ou fédérale. Qui plus est, les décisions qui sont prises par nos représentants et représentantes ne font pas toujours l’unanimité de leur électorat, qui s’exprime alors à certains moments par la voix et le geste, notamment durant quelque manifestation. Cela dit, il arrive aussi que les décisions ravissent presque tout le monde et qu’une fierté nationale émerge des flots politiques tumultueux.
Parmi cet électorat, on compte les membres de l’industrie langagière. Nous pouvons affirmer haut et fort que la politique et notre industrie sont fortement liées. En effet, comme nous le démontre Donald Barabé, traducteur agréé et ex-président de l’OTTIAQ, c’est l’appui des politiciens et politiciennes qui a créé la demande de traductions officielles. Rapidement, dans la société canadienne, le besoin de diffuser l’information dans les deux langues officielles a été reconnu. Il s’ensuit de nombreuses lois et modifications législatives, tant fédérales que provinciales, qui auront un impact sur chaque langagière et langagier au pays.
Bien entendu, lorsque nous abordons la politique, nous devons aussi aborder les élections. Dans son article, Marc Pomerleau nous explique que l’incidence de la traduction n’est pas négligeable. Il brosse ainsi un portrait historique de la pratique traductionnelle électorale, voire électoraliste, au Québec, avec illustrations éloquentes pour étayer ses propos.
La politique sert à guider la population d’un pays, d’un État, d’une collectivité. C’est dans cet esprit que Valérie Florentin, traductrice agréée, s’interroge sur le rôle de la traduction dans le tissu social canadien. Elle contemple ainsi les dérives possibles de l’intelligence artificielle en traduction et dès lors l’importance de recadrer la formation pour recentrer les décisions traductionnelles vers l’être humain.
Pour sa part, Renée Desjardins témoigne des conséquences de la non-traduction, notamment au sujet de la pandémie de COVID-19 au Manitoba. Lorsque la politique n’oblige pas à traduire, les résultats peuvent coûter des vies. Elle plaide donc pour une traduction humaine et humaniste, passant par une formation adaptée, pour toutes les communautés. Elle est ainsi d’opinion que les lois devraient être améliorées en ce sens. Enfin, Maria Ortiz Takacs, traductrice agréée, fait ressortir dans la chronique La esfera hispánica les liens entre le droit et la traduction au Canada et au Québec.
Nous espérons que ce numéro saura vous plaire et qu’il vous fera aussi réfléchir à l’impact de la politique sur votre pratique quotidienne.