Tout comme on sait que le ciel est bleu, dans le monde de la traduction, il est bien connu que les traducteurs sont le plus souvent… des traductrices. Depuis les salles de cours de l’université jusque dans les équipes en milieu de travail, on peut faire cette constatation.
Dans le présent numéro, nous avons voulu aller à la rencontre d’un échantillon de ces traductrices pour leur demander de pousser un peu la réflexion (et dans certains cas la recherche) et de nous exposer ce qu’elles pensaient de la situation des femmes au sein de la profession.
Exceptionnellement, ce numéro de Circuit comporte trois témoignages. Anne-Marie DeVos, ancienne présidente de l’OTTIAQ, s’interroge sur le type de pouvoir qu’elle a exercé pendant qu’elle était à la tête de l’Ordre, tandis que Céline Imbaud, chef d’entreprise, se demande si le fait d’être une femme a été un défi ou un atout dans sa carrière. Pour sa part, Sonia Corbeil, traductrice agréée, nous raconte les chemins tortueux qui l’ont menée à la traduction après bien des détours. Chacune à sa façon, ces trois autrices abordent un aspect important de la vie de bien des traductrices : la maternité et la vie de famille.
Par ailleurs, Lori Saint-Martin, traductrice littéraire, a sondé des traductrices de son domaine d’exercice, qui, au Canada du moins, semblent s’épanouir pleinement, à l’abri du sexisme souvent présent dans le milieu culturel. De son côté, Judith Woodworth, professeure de traduction et de traductologie, nous dépeint elle aussi un milieu qui semble propice à l’épanouissement des femmes. Elle nous met cependant en garde contre l’éventuelle « ubérisation » de la traduction, ce secteur d’activité pouvant à son avis facilement dériver vers ce genre de pratique. Maria Ortiz, traductrice juridique, nous parle quant à elle des traductrices de l’Amérique latine. C’est sans grande surprise que nous apprenons qu’elles y sont aussi en grande majorité. Mme Ortiz a par ailleurs interrogé des professionnelles latino-américaines qui nous livrent leurs réflexions à ce sujet. Ces trois articles rédigés respectivement en français, en anglais et en espagnol dressent un portrait plutôt optimiste de la place des femmes au sein de la profession, où elles sont majoritaires.
Pour finir, seul auteur parmi le bouquet d’autrices qui composent ce numéro, Philippe Caignon, rédacteur en chef de Circuit, rend un très bel hommage à quatre langagières qui ont changé sa vie… professionnelle.
En complément au dossier, la chronique Entretiens présente deux femmes qui ont fait et continuent de faire leur marque dans deux aspects de la profession : Barbara McClintock a rencontré Jane Finlayson, directrice des services linguistiques de CPA Canada, et Danielle Jazzar s’est entretenue avec la professeure Lynne Bowker, de l’Université d’Ottawa, première traductrice nommée chercheuse en résidence de la bibliothèque de l’Université Concordia.
Bref, à la lecture de ce numéro, nous pouvons constater que, même si tout n’est pas rose bonbon pour les traductrices, la traduction est un domaine où les femmes ne sont pas contraintes à jouer des coudes puisqu’elles sont reconnues pour ce qu’elles sont : des professionnelles.