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Révision et postédition… véritables jumelles?

Par Philippe Caignon, terminologue agréé et traducteur agréé

La postédition fait l’objet de nombreuses discussions autant dans le milieu universitaire que dans les cabinets de traduction. Lorsqu’on parle de postédition, on fait bien sûr référence à la vérification de la qualité d’un texte traduit par une machine, puisqu’on qualifie la vérification de la qualité du travail d’une personne humaine de révision.

En fait, le concept existe depuis plusieurs décennies. Le Grand dictionnaire terminologique (GDT), par exemple, comprend une fiche sur la postédition1 datant de l’an 2000. Cette fiche au contenu sobre comporte néanmoins la remarque suivante : « La postédition correspond à l’étape de révision en traduction humaine. » Il est intéressant de noter que le GDT considère la postédition et la révision comme des étapes équivalentes de la traduction, qu’elle soit machine ou humaine. Bien entendu, on devrait peut-être écrire « considérait » plutôt que « considère » puisqu’il s’est passé presque 23 ans depuis la rédaction de la fiche. Le concept pourrait ainsi avoir gagné en traits et en nuances sémantiques.

Pour pousser la réflexion un peu plus loin, rien de mieux que de lire quelques articles rédigés par des autrices et des auteurs qualifiés. Nous commencerons donc le présent numéro par l’article de Julián Zapata et Sébastien Polikar. En effet, ces deux auteurs cherchent à différencier la révision de la postédition. S’appuyant entre autres sur les travaux des professeurs Félix do Carmo et Joss Moorkens, ils expliquent la spécificité des processus qui soutiennent les deux notions.

Pour continuer la réflexion, nous vous proposons un article présentant une collaboration unique entre le secteur public et le secteur privé. Ainsi, Stéphanie Brisson, François Chartrand et Danièle Marcoux s’unissent pour expliquer pourquoi et comment ils travaillent ensemble pour remanier un cours de révision grâce à un partenariat public-privé qui tient compte du fait que le milieu professionnel de la révision a de plus en plus recours à la postédition.

Comme nous le constatons donc, la postédition change non seulement la donne dans l’exercice quotidien de la profession mais elle le fait aussi dans la façon dont on l’enseigne. L’article de Valérie Florentin relate justement les modifications qui peuvent être appliquées à la formation en traduction. Elle prend l’exemple de l’apprentissage de la responsabilité professionnelle pour illustrer ses propos. Elle interpelle ainsi ses étudiantes et étudiants sur des questions d’éthique en lien avec les textes postédités et les fait réfléchir sur les répercussions de leurs choix professionnels à venir.

Nous poursuivons notre réflexion avec Rudy Loock qui nous entretient de la documentation scientifique qui existe à propos des questions touchant à la traduction automatique et à la postédition. Pour l’auteur, la recherche dans les domaines de la traduction automatique et de la postédition ouvre des voies de formation pour toute personne qui apprend ou qui exerce la profession.

Pour sa part, Atissa Béland, langagière enseignant et exerçant la profession de traductrice depuis des années, nous révèle ce qu’il nous faut savoir avant de nous lancer en postédition. Elle présente les différences qu’elle perçoit entre la révision et la postédition. Elle aborde entre autres sujets les types d’erreurs, la qualité des textes traduits par une machine et la confidentialité des données. De plus, elle fait la distinction entre les notions de postédition brute et de postédition évoluée.

Ensuite, Barbara McClintock nous explique les changements qu’entraînent les technologies de la traduction, comme la traduction automatique neuronale, sur le flux de travail en traduction.

De leur côté, Maria Ortiz Takacs, Julián Zapata et Juan Felipe Zuluaga Molina nous dévoilent les principaux enjeux de la postédition en traduction juridique français-espagnol, dans la chronique La esfera hispánica.

Enfin, dans la chronique Entretiens, Louis Noreau, interviewé par Barbara McClintock, nous présente les problèmes qui surgissent lorsqu’un texte scientifique est traduit par une machine. En effet, la rédaction scientifique française et la rédaction scientifique anglo-américaine utilisant des stratégies argumentatives différentes, la postédition des traductions machines liées à ce domaine est une activité complexe et pleine de nuances. En lisant l’article nous pourrons savoir si, selon M. Noreau, la traduction automatique et la postédition présentent un avantage sur la traduction humaine et la révision.

Nous vous souhaitons une excellente lecture de ce numéro de Circuit.


1 Office québécois de la langue française (2000). « postédition » in Grand dictionnaire terminologique. Page consultée le 22 novembre 2022. [En ligne] https://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=8369757


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