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Le terminocyclisme, vous connaissez? 

Imaginez une salle de classe sans exposé magistral, où meuglent les vaches, où brille le soleil. Une salle où les étudiants réfléchissent longuement et échangent spontanément leurs idées sur la matière enseignée. Imaginez de multiples rencontres en entreprise entre des étudiants motivés et des langagiers généreux. Bienvenue dans le monde de Termino à vélo!

Par Jean Quirion, terminologue agréé, Joanie Brault, Nancy Fullerton, André LaFrance et Kira Sabrina

Termino à vélo, cours offert à l’Université d’Ottawa, permet aux étudiants d’apprendre ce qu’est la terminologie en milieu de travail tout en parcourant le Québec à vélo. Inspiré par une idée semblable mise en place à HEC Montréal, le professeur Jean Quirion a invité les étudiants de traduction, qu’ils soient francophones ou anglophones, à s’inscrire au cours, étant entendu que l’investissement requis allait au-delà des simples droits de scolarité. C’est ainsi que onze étudiants ont visité trois cabinets de traduction (TRSB, Mégalexis et Lemieux Bédard), deux pigistes (Dominique Robidoux, de Point-Virgule, et France Parenteau), deux services linguistiques en entreprise (Groupe TMX et Deloitte), de même que les bureaux du dictionnaire Usito et de l’Office québécois de la langue française. Ce périple leur aura donné une vue d’ensemble de l’état de la terminologie dans une variété de domaines.

Comment ça fonctionne?

Termino à vélo a officiellement débuté en juillet 2016, avec des modules obligatoires de lecture sur les notions de terminologie. Et bien qu’aucun programme d’entraînement physique n’ait été imposé aux étudiants, la plupart ont roulé plus qu’à l’accoutumée pour se préparer aux longues randonnées à venir. Au matin du 22 août, le professeur et les étudiants se sont rencontrés pour faire connaissance et discuter des sujets à l’étude. En après-midi, un guide de Vélo Québec a rejoint le groupe pour revoir les consignes de sécurité et procéder à une randonnée préliminaire, question de faire rouler ensemble les participants et de vérifier l’état de leurs vélos. Le grand jour enfin arrivé, et les bagages et vélos chargés dans la fourgonnette de Vélo Québec, le groupe s’est dirigé vers Montréal en autobus. Après quelques visites dans la métropole, le peloton a entamé son voyage et alterné visites et cyclisme, pour parcourir près de 500 km en deux semaines et finalement atteindre Québec.

Une démarche pédagogique

L’intention était de mettre les étudiants en contact avec le monde professionnel de la terminologie. Si les objectifs de la démarche demeuraient les mêmes que ceux du cours traditionnel, eux-mêmes étant largement calqués sur la grille de compétences du terminologue agréé de l’OTTIAQ, l’évaluation en a été adaptée. Des discussions fréquentes entre les terminocyclistes et leur professeur ont permis de faire le point et d’organiser l’information obtenue au fil des rencontres.

La formule, qui présentait d’importants avantages pédagogiques, ne permettait toutefois pas aux étudiants de manipuler les outils terminotiques. Ils se sont donc présentés d’eux-mêmes aux séances hebdomadaires de laboratoire du trimestre d’automne, ayant constaté l’importance de cette compétence en milieu de travail.

Découvrir le monde professionnel

Conscients qu’ils s’adressaient à des étudiants au seuil d’une première expérience de travail ou d’une seconde carrière, tous les hôtes se sont efforcés de bien leur expliquer la profession de langagier et de leur faire connaître les attentes professionnelles liées à celle-ci. Ils n’ont par ailleurs pas hésité à répondre à leurs questions. De leur côté, les étudiants ont bien reçu ces renseignements rares et privilégiés qui illustraient de façon claire les liens entre le monde universitaire et le milieu professionnel.

Dans cette perspective, les lectures préalables ont trouvé leur valeur pratique. En effet, les étudiants ont découvert que certains textes scolaires accordent un poids démesuré à un volet peu présent sur le marché, soit la recherche terminologique thématique. Les entreprises se concentrent en général sur des recherches ponctuelles, menées dans de brefs délais car dans ce monde réseauté, où le temps presse et où la concurrence est forte, le rapport qualité-prix doit séduire le client.

Par ailleurs, les participants ont observé le contraste entre certains milieux où la terminologie ne figure pas au premier plan et d’autres où une solide équipe de terminologues s’affaire à enrichir la qualité des traductions; ou encore la différence entre la traduction d’un rapport annuel, qui s’effectue parallèlement à la rédaction en raison des délais serrés de production du document, et la traduction quatre fois révisée de la monographie d’un produit. Ils ont également constaté que les pressions commerciales éclipsent parfois les meilleures recommandations terminologiques.

L’expérience humaine

 

Entraide Pleins feux sur l’encouragement mutuel et l’entraide. Photo : gracieuseté de Jean Quirion

Au-delà de la formation universitaire, il y a les gens. Termino à vélo, c’est, outre l’acquisition de connaissances terminologiques, le développement de l’esprit d’équipe et l’effort collectif vécu au quotidien. Les participants travaillent ensemble pour atteindre des objectifs communs, s’encouragent mutuellement et célèbrent les exploits des uns et des autres. L’habileté à adhérer à une pensée collective, au-delà de sa propre personne, représente d’ailleurs une valeur ajoutée pour les employeurs. La collaboration sert en effet autant à rouler en peloton qu’à mener à bien un important contrat de traduction.

 

 

 

Jean Quirion est directeur de l'École de traduction et d'interprétation de l’Université d’Ottawa ainsi que professeur agrégé et membre de la Faculté des études supérieures et postdoctorales de la même université. Joanie Brault, Nancy Fullerton, étudiante inscrite à l’OTTIAQ, André LaFrance, membre étudiant de l’ATIO, et Kira Sabrina sont étudiants à l’Université d’Ottawa.


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